Nina s’impatiente :
— Accouche. On
dirait Alex.
— Bon, j’y arrive. Voilà mon hypothèse puisque je n’ose
plus rien affirmer. Quand les brésiliens se sont faits faucher leurs vingt
kilos d’or par les vénézuéliens, vous pensez qu’ils sont restés les bras
croisés en se disant : « Ah ! mince alors, ils nous ont bien eus, tant
pis on fera plus attention la prochaine fois » ? Ils ont quand même dû la
chercher leur caisse d’or et ont vite retrouvé la trace de ceux qui la leur
avaient prise car un avion ne disparaît pas si facilement dans la nature.
D’une manière ou d’une autre, et pas forcément en douceur, ils ont réussi
à savoir non seulement où elle était cachée mais aussi comment et quand elle
devait être exfiltrée. Cet avion serait tout simplement venu récupérer
l’or caché sur l’île. Je vous rappelle que c’est celui qui a le plus
grand écart entre les roues ce qui signifie qu’il s’agit probablement
d’un appareil assez gros avec l’autonomie pour un aller-retour avec le
Brésil. Mais ne voulant pas se contenter de récupérer l’or et voulant aussi
éliminer ceux qui la leur avaient volée au cas où il leur viendrait l’envie
de recommencer ou par vengeance, ils ont pris l’or dans la caisse, l’ont
remplacé par du plomb, peut-être trouvé sur la base militaire de l’île,
puis remis la caisse en place dans sa cachette. Pour ouvrir la caisse, il a
fallu un ciseau à bois pour les clous et un tournevis pour les vis ce qui
prouve que cette caisse a servi deux fois et que quand elle a été refermée,
il manquait des vis ou elles étaient cassées d’où l’ajout de clous ou
l’inverse. Ensuite il suffisait de faire parvenir à l’équipage de pirates
du Bertram 61, les détails du rendez-vous du bateau de pêche dont on a vu la
photo dans le téléphone d’un des membres de l’équipage en les laissant
penser qu’ils avaient trouvé seuls ces informations. Il était évident que
ces pirates ne manqueraient pas d’attaquer ce bateau pour lui voler sa
cargaison et s’en débarrasseraient de leur manière expéditive habituelle à
grand coup d’explosifs. Manque de chance pour eux, rien ne s’est passé
comme prévu. Premièrement les vénézuéliens ont mis la caisse à l’eau ce
qui n’est pas le plus grave puisque si, même nous, avons pu la remonter, ils
auraient pu le faire. Mais surtout Murielle est arrivée avec ses
copains.
— Ce ne sont pas mes copains !
— Le résultat : une
dizaine de morts, la caisse au fond que seuls les brésiliens savent remplie de
plomb et là-dessus à la faveur d’un repas bien arrosé et d’une dorade au
poivre dans le carré d’un bateau, sept imbéciles se montent une gamberge
grosse comme l’Himalaya et six d’entre eux se pointent avec leurs joujoux
pour récupérer une caisse sans la moindre valeur et dont tout le monde se
fout.
Alex répond :
— Et c’est avec une telle prise de conscience
de notre bêtise que tu comptes nous remonter le moral ?
— Ne
t’inquiète pas, à quelque chose malheur est bon. D’autant qu’il ne
s’agit pas d’un grand malheur. On arrivera bien toujours à faire quelque
chose de cela.
— Je me demande bien
quoi.
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