— Bonsoir comment va ?
— Ça va. Dom
et Béa sont là ? Ça sent bon.
— Il n’y a pas qu’eux, je vais vous
présenter des amis. Dom a péché une dorade qu’il est en train de préparer.
Il paraît qu’il est spécialiste.
— Oui on sait, il nous a déjà fait
le coup.
Nina et Alex descendent dans le grand carré de L’Ombre Blanche.
Dom s’affaire à la cuisine et Béa est en discussion avec deux autres amis
que Raymond leur présente :
— La pitchoune là, c’est Murielle, ma
voisine. Elle est douanière…
Un moment de silence puis dans un rire
tonitruant à l’accent du midi rajoute :
— Défroquée, elle n’y
croit plus, elle a rendu sa soutane.
Ouf !
Murielle, fille de policier
et de femme de policer, petite fille de gendarme et de femme de gendarme, nièce
de douanier et de femme de douanier, vient donc d’une famille d’hommes en
uniforme et de femmes qui admirent l’uniforme. Selon ses dires, le seul homme
sans uniforme de la famille serait un espion. Elle a fini son droit il y a
quelques années, aime les voyages et a un goût marqué pour l’aventure et la
mer. Qui dit voyages dit frontières. Elle aime la mer, elle sera donc marin des
douanes. Heureusement pas longtemps. De longs cheveux bruns bouclés et épais,
de grands yeux noirs et un sourire qui respire la franchise. Elle, douanière ?
Non ce n’était pas possible.
— Le grand là, c’est mon petit neveu
Patrick qui m’a enfin fait le plaisir de venir me voir en Martinique. Ça fait
plusieurs années que je l’attends mais il est toujours en voyage. Il est
reporter et ne veut pas me croire quand je lui dis qu’il y a un sacré article
à faire rien que sur les fadas qui vivent dans le coin sur leurs
bateaux.
Patrick rentre d’un reportage un peu compliqué dans les milieux
de l’orpaillage clandestin qui l’a conduit au Brésil, en Guyane et au
Venezuela. Il parle couramment l’espagnol. Il a rencontré des tas de gens pas
très fréquentables et s’est plongé dans l’enfer des orpailleurs où celui
qui fait fortune n’est pas forcément celui qui creuse mais celui qui vend la
pelle. Patrick avait besoin de souffler un peu. Il est aussi plongeur, il a
beaucoup navigué et il connaît bien la région et les Caraïbes.
Dom a
déjà allumé le four et il commence à faire chaud dans le bateau.
—
Venez dans le cockpit, il fera plus frais pour le ti-punch. Béa passe nous tous
les petits trucs sur la cuisine qu’on grignote un peu pendant que Dom
bosse.
Tout le monde s’installe autour de la table dans le grand cockpit
confortable. C’est une belle soirée tropicale. Il fait déjà nuit depuis
presque une heure. L’apéritif est servi ti-punch, planteur, Lorraine, Carib,
pastis… Béa raconte leur partie de pêche. Partis ce matin en direction du
Diamant puis retour au moteur face au courant, la traîne en remorque, ça a
fini par mordre à trois miles du Diamant. Une belle dorade de deux kilos qui
n’aura pas le temps de s’ennuyer.
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